Page:Renel - La Race inconnue, 1910.djvu/26

Cette page n’a pas encore été corrigée

vasque, et regarda la mer. Au large elle moutonnait, venait se briser en une longue barre blanche sur les récifs de corail. Puis, jusqu’à la côte, de molles ondulations la soulevaient d’un mouvement rythmique, pour répandre sur le sable l’éternel flot de ses eaux frangées d’écume. Lanthelme, depuis dix ans qu’il était établi sur la côte, éprouvait tous les jours, devant cette mer bleue, la même envie, jamais encore satisfaite, de prendre un bain. Aucun Européen ne s’y hasardait, à cause des requins : ils pullulaient en ces parages ; on en voyait de toutes les espèces, des noirs, d’autres d’un blanc laiteux, certains avec des ailerons blancs à extrémité noire, et les requins-marteaux, à tête plate, avec des yeux démesurés à fleur de peau. Les indigènes n’y faisaient pas grande attention. Beaucoup se baignaient, sans manifester aucune peur. Ils entraient dans l’eau, certains jours, par villages entiers, pour la pêche au lamba à marée haute ou pour la pêche au filet à marée basse. Dans ces occasions, il n’y avait jamais d’accidents, mais parfois on parlait d’hommes et de femmes isolés, enlevés ou mutilés par les squales.

Dans la chaleur humide de cette matinée de décembre, en plein été tropical, la mer était particulièrement attirante ; Prosper Lanthelme, une fois de plus, rêvait aux délices interdites d’un bain. II avait chaud et soif ; réunissant les deux mains en forme