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avec une sérénité un peu puérile, tous les actes de la vie ; il se mit à aimer Ranirina d’une passion calme et entêtée comme sa personne.

Elle tenait la maison en ménagère méticuleuse et entendue, comme sont toutes les Betsimisaraka ; lui retrouvait en elle les qualités des femmes de sa race, leur humeur égale et passive, avec peut-être un peu plus de gaieté dans le gemüth cher à tout Allemand. Parfois Ranirina regrettait la joie de vivre tumultueuse de ses compagnons d’antan, mais elle sacrifiait volontiers quelques heures de plaisir à la tranquillité de sa vie. Elle faisait elle-même le marché, défendait sou à sou, contre l’avidité des fournisseurs, la bourse du ménage, et tenait la case avec une propreté toute betsimisaraka. Cela dura deux ans, après quoi l’Allemand désolé lui dit un jour qu’il allait retourner dans son pays pour entrer définitivement dans la maison de commerce de son père. Ranirina eut une crise de désespoir sauvage ; pendant des heures elle gémit comme une bête blessée ; le sensible Allemand ne put supporter cette douleur, qu’il partageait du reste ; il pria sa famille, sous prétexte d’expérience commerciale, de lui accorder une troisième année. Il l’obtint.

Leur vie paisible reprit. Parfois le vazaha souhaitait de la voir continuer toujours ; quand la ramatou, à l’heure de la sieste, se blottissait auprès de lui, appuyant sa joue fraîche et veloutée contre la