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que le prescrit l’usage, puis on l’avait attaché le long d’un bambou. Il semblait ainsi extraordinairement mince et grand. Pourtant les deux bourjanes qui devaient le porter le soulevèrent sans peine, car dans les derniers jours Ralahy avait beaucoup maigri. On se mit en route. Les deux femmes marchaient devant, d’un pas rapide, sans tourner la tête en arrière. Leurs cheveux raides, entièrement dénoués, se hérissaient autour de leur tête comme des broussailles, et leur donnaient une expression farouche. Elles ne se lamentaient point, mais leurs yeux vidés de pleurs apparaissaient troubles comme des pierres blanches au fond d’une rivière, et leur douleur était profonde comme une nuit sans lune. Elles avaient tellement hâte d’arriver à Tananarive que, par moments, elles couraient presque. Derrière elles, les deux bourjanes, suivis d’un troisième qui les relayait alternativement, portaient le cadavre, comme une charge ordinaire. Ils allaient d’un pas égal et allongé, tantôt dépassés par les deux femmes, et tantôt s’en rapprochant à les toucher. A six heures Tananarive apparut avec ses palais dominant les pentes rocailleuses et ses cases innombrables perdues dans la verdure au pied de la montagne. C’était un soir tragique d’Imerina : tout rougeoyait à l’occident, les montagnes, la plaine de Betsimitatra, les nues du ciel, mais les splendeurs roses des premiers plans illuminés