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XXXV
PRÉFACE.


ému et de souffrir. A. la nature il reconnut le droit d’être naturelle. A. l'accent dont il en parle, on devine qu’il aime l’humble grillon, et il ne nous cache point sa sympathie pour la " famille d’arbres ".

Il n’était pas encore satisfait. " Défiez-vous " m’ écrivait-il "du mot de la fin. Il faut qu’une page soit belle pour elle-même, et non pour la surprise des dernières lignes. D’ailleurs, il faut que les dernières lignes soient aussi belles que les premières. " Il s’inquiétait aussi d’avoir, en arrangeant ses observations pour les disposer dans le cadre d’un conte, montré la réalité différente de ce qu’il l’avait surprise dans ses palpitations originelles : n'avait-il pas trop lustré les plumes de l’oiseau trouvé au nid ? Désormais, il ne sera plus chasseur d’images, sinon — que l’on me permette ce mot, qui n’est pas " de la fin " — pour les chasser de ses livres. Il n’y aura plus la surprise des dernières lignes, ni le cadre imposé du conte. A la vérité, tels passages des Philippe, du Vigneron et des Bucoliques annonçaient Nos frères farouches : ici, l’intention de netteté et de sobriété est plus évident encore, et plus absolu le dépouillement de toute littérature. Il n’y a plus de mots à effet, parce que tous sont destinés à porter. En de brefs paragraphes la physionomie des personnages est fixée, trait par trait, de façon précise, rude, et belle.

2. Ce qu’il n’est pas — Quelque paradoxale qu’en puisse paraître l’affirmation, Renard n’est pas un écrivain " pour anthologie ", du moins pour un de ces recueils destinés aux enfants de l’école primaire, ni même aux élèves des lycées. Qu’il y figure en réalité, peu m’importe. Les uns et les autres sont frappés, d’instinct, par la grandiloquence d’un poète, d’un romancier, d’un historien, qui chante, embellit, décrit des événements et des héros dont les dates et les noms sont connus de tous. Le " Petit gars