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JULES RENARD

Avant de s’endormir, il toussote sous le drap, pour déblayer sa gorge. Mais peut-être ronfle-t-il du nez ? Il fait souffler en douceur ses narines afin de s’assurer qu’elles ne sont pas bouchées. Il s’apprend à ne pas respirer trop fort. Mais, dès qu’il dort, il ronfle. C’est comme une passion. Aussitôt Mme Lepic lui entre deux ongles (deux suffisent), jusqu’au sang, dans le plus gras d’une fesse. Elle a fait choix de ce moyen.

Le cri de Poil-de-Carotte réveille brusquement M. Lepic, qui demande :

— Qu’est-ce que tu as ?

— Il a le cauchemar, dit Mme Lepic.

Et elle chantonne, à la manière des nourrices, un air berceur qui semble indien.

Du front, des genoux poussant le mur comme s’il voulait l'abattre, les mains plaquées sur ses fesses pour parer le pinçon qui va venir au premier appel des vibrations sonores, Poil-de-Carotte se rendort dans le grand lit où il repose, à côté de sa mère, au fond.


IX

Coup de Théâtre


SCÈNE I


MADAME LEPIC

Où vas-tu ?

POIL-DE- CAROTTE

(Il a mis sa cravate neuve et craché sur ses souliers à les noyer.) Je vas me promener avec papa.