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LA GLOIRE DU COMACCHIO

tue : cette précieuse Chiarina que j’avais demandé à voir ?… Nous la réserves-tu jaillissant d’une tourte, sans plus de voiles qu’Andromède, afin que nous estimions la ressemblance tout à notre aise ?… Si cela est, bravissimo ! Et sus au repas ! »

— « Je n’y comprends rien, Monseigneur,… Chiarina n’est pas encore arrivée… » dit Baccio en chiffonnant la pointe brodée de son col. « Dans un moment, sans doute… »

— « J’ai faim », brusqua le duc.

— « Montons ! montons ! Si Votre Altesse veut bien nous précéder… »

Le majordome toussa fictivement. La musique s’éteignit aussitôt. Mais trois pinceurs de guitare jouèrent la ritournelle d’un chant carnavalesque composé par le duc lui-même, et le chanteur Bridone entonna la première strophe. Dans le cortège, les poètes repassaient des vers, pour les déclamer de place en place au cours du festin. Baccio se sentait de fort méchante humeur.

— « Bast ! » lui dit le duc : « Ne taquine pas les ferrets de ton aiguillette, apaise-toi.