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LA GLOIRE DU COMACCHIO

palais della Tacca. Les masques sautèrent, et, des manteaux rejetés, surgirent, en leurs costumes du dernier galant. Monsieur da Este et ses âmes damnées.

Baccio, tout habillé d’aurore, s’avançait à la rencontre de ses hôtes. Sa chevelure retombait en lourdes coques. Il avait le col flexible et le doux visage d’une femme. À Ferrare, certains raillaient sa mine de travesti, mais d’autres, se souvenant de Raphaël, penchaient à vénérer cette grâce hermaphrodite.

Il s’adressa au grand diable de cavalier qui faisait bouffer ses manches à gigot :

— « Salut, libéral protecteur des Arts ! Monseigneur, votre esclave est honoré plus qu’il ne saurait dire… »

— « Moins de bavardage, cousin ! La statue, voilà ce qui m’intrigue. »

— « Par ici, Magnifique ! »

Baccio lui-même avait choisi l’heure de la visite, en mémoire d’une anecdote qui courait sur le Jupiter de Cellini et dans l’assurance que son Andromède gagnerait encore au jeu d’un éclairage savant. Plus de cent