Page:Renard - Outremort et autres histoires singulières, Louis-Michaud, 1913.djvu/209

Cette page a été validée par deux contributeurs.
205
LA GLOIRE DU COMACCHIO

Un rude coup de pied l’interrompit :

— « Assez de prédictions, flagorneur ! Cela coupe la chance. La Fortune déteste qu’on la précède. — Fais-moi sauter cette poutrelle. Hardi ! »

Les bois volaient, s’empilant au hasard sur le sol jonché de spatules, de grattoirs, de ciselets…

Enfin la statue se dressa pure et nue. Elle figurait une jeune femme très belle et infiniment triste. Son attitude était une harmonie ; et tout, dans l’inclinaison de sa tête petite, dans la pose de son corps allongé, indiquait la résignation la plus noble et la superbe indomptée.

Maintenant la baraque était silencieuse comme un temple où l’idole vient tout à coup de manifester qu’elle est vraiment divine. On admirait.

— « Au-dessus de tout ce qui existe ! » s’écria Felipe.

Cesare, plein de joie cependant et de vanité, regrettait :

— « Et encore ! elle n’est qu’en plâtre !… »

— « Qu’importe ! » lança Goro qui tremblait,