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le péril bleu

» La piste de Marie-Thérèse — celle de droite — est plus compliquée. Venant du piétinement, une suite de pas précipités se dirige vers la croix ; mais soudain, à un mètre de celle-ci, un crochet les rabat sur la droite, et ces pas se mettent à descendre le versant du Rhône, à toute vitesse. Nous comptons six empreintes depuis le crochet ; mais ce ne sont plus des enjambées, ce sont de véritables sauts ; c’est une course folle sur une pente scabreuse, et qui finit soudainement à la sixième empreinte. — Dernière impasse.

» Il y eut donc un instant où Fabienne et Marie-Thérèse se sont hâtées dans la même direction, qui était, pour Fabienne, celle d’Henri, et pour Marie-Thérèse, celle de Fabienne et d’Henri. Une cause inconnue empêcha la première d’arriver jusqu’à son mari et fit rebrousser chemin à la seconde. Ce fut sans doute cette même cause qui les escamota tous les trois. »

— « Certainement cela ne s’est pas effectué sans bataille », dit M. Monbardeau. « Cette canne brisée… C’est bien la canne d’Henri… Je la reconnais. »

— « Que ce soit celle de M. Henri ou une autre, » répondit Robert, « le point capital est que ce soit la canne dont M. Henri se servait samedi. Son bout ferré ne peut s’adapter qu’aux empreintes de gauche. »

— « Ce que je ne comprends pas, » marmonna Tiburce, « c’est qu’elle se trouve si loin des traces de M. Henri Monbardeau… »

— « Ah ! parfaitement », reprit Robert. « Messieurs, je vous prie de noter la position occupée par cette canne, à savoir : près de la croix, entre la piste montante de Mme Henri Monbardeau et le crochet de Mlle Le Tellier, c’est-à-dire à sept mètres cinquante environ du piétinement où se manifeste pour la dernière fois la présence — la présence calme, j’insiste — de M. Henri. »

— « Il l’aura jetée de là ? » proposa M. Monbardeau.

— « Non. J’y ai pensé. Cela n’est pas possible. Car alors il l’aurait lancée contre les deux femmes, au risque de les blesser ; et votre fils n’est pas homme à perdre la tête à ce point. »

— « Mais, qui vous dit », contesta Garan, « que les