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le docteur lerne, sous-dieu

Lerne remarqua le geste et sembla prendre une soudaine résolution.

— Laissez cela !… Laisse, Nicolas ! commanda-t-il assez impérieusement. Tout à l’heure j’enverrai chercher ton bagage. Auparavant, nous avons à causer. Viens faire une promenade.

Il me prit le bras et m’entraîna vers le parc.

Cependant il réfléchissait encore.

Nous passâmes près du château. À quelques-unes près, les persiennes étaient closes. La toiture, en maint endroit, s’affaissait, parfois même crevée, et les murailles lépreuses, décrépies sur de larges plaques, montraient de-ci de-là leur maçonnerie. Les arbustes en caisse encadraient toujours l’édifice, mais sans contredit, au cours de plusieurs hivers, on avait négligé de mettre au chaud verveines, grenadiers, orangers et lauriers. Debout dans leurs coffres éventrés et pourris, tous étaient morts. Le parvis de sable, naguère soigneusement ratissé, pouvait se croire une mauvaise prairie, tant l’herbe y foisonnait, mêlée d’orties et de ciguës. On eût dit le manoir de la Belle-au-Bois-dormant, à l’arrivée du Prince.

Lerne, à mon bras, marchait sans parler davantage.

Nous contournâmes la triste demeure, et le parc s’offrit à mes yeux : un fouillis. Plus de corbeilles fleuries ni de larges rubans sablés et flexueux. Sauf, devant le château, la pelouse, — qu’on avait métamorphosée en pâturage, enclose de fils de fer, et donnée