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le docteur lerne, sous-dieu

infernale curiosité doit te soutenir, et je gage que tu es moins fâché qu’intrigué, hein ?… Allons, je suis bon prince, et, puisque te voilà discret, mon cher élève, écoute l’enseignement dont tu restes avide. Ne t’avais-je pas prédit : « Le moment s’approche où tu sauras tout. » Nicolas, tu vas tout savoir. Aussi bien me déplairait-il de passer pour un diable, un thaumaturge ou un sorcier. Ni Belphégor, ni Moïse, ni Merlin : — Lerne tout court. Ma puissance ne vient pas de l’extérieur, elle est mienne, et je m’en flatte. C’est ma science. Tout au plus pourrait-on rectifier que c’est la science de l’humanité, que j’ai continuée à mon heure et dont je suis le pionnier le plus avancé, le détenteur principal… Mais n’ergotons pas. Les pansements te bouchent-ils les oreilles ? Peux-tu m’entendre ?

Je fis un signe de tête.

— Bien. Écoute donc, et ne roule pas tes prunelles : tout va s’expliquer ; sapristi, nous ne sommes pas dans le roman !…

Les aides fourbissaient et rangeaient les ustensiles. Mon corps endormi ronflait. Ayant traîné l’escabeau près de moi, Lerne s’assit à ma hauteur et discourut en ces termes :


— D’abord, mon cher neveu, tout à l’heure j’ai eu tort de t’appeler Jupiter. Au sens étroit des mots, je ne t’ai pas métamorphosé en taureau, et tu es toujours Nicolas Vermont, car le nom désigne surtout la per-