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beaucoup d’argent, nous serons très riches. Oh ! je ne tiens pas à l’argent.

Daphnis. — Avec un chiffre de combien assuré ? Je me disais, jeune marié : « Voilà une femme courageuse que la misère n’effraiera pas et qui vivra avec moi sous une cabane de cantonnier ! » et je ne demandais au Seigneur que de nous donner notre pain quotidien, du pain de ménage si c’était possible, jusqu’au jour de ma mort où tu ferais la grande collecte définitive.

Chloé. — Tu m’honorais. Mais si cette bonne opinion de moi t’encourage à la paresse, je préfère tout de même que tu arrives.

V

Chloé. — Quand tu es là, devant ton bureau, et que tu n’écris pas, qu’est-ce que tu fais ? Assurément, penser, c’est travailler. Il est des paresses fécondes. Remarque comme je retiens aisément tes phrases. Mais (suis-je sotte ?) j’aime mieux te voir, dans ton intérêt, un porte-plume à la main.

Daphnis. — Il fallait le dire ! Tranquillise-toi. Désormais j’aurai un manche de pioche.

VI

Chloé. — Tu seras célèbre.

Daphnis. — Diable ! y tiens-tu ? je ne te le garantis pas.

Chloé. — Tu seras célèbre, j’en suis sûre, quand