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BUCOLIQUES


s’occupe de politique au village et tourmente son mari.

De pauvres ménages, habitués à une misère commune, n’ont de scènes que la veille des élections.

— Tu vas voter pour un homme sans Dieu, toi, hébété !

Le mari cède ou fait semblant de céder et cache, la nuit, sous l’oreiller, son bulletin de vote que sa femme déchirerait.

Le dimanche, à la messe, tandis que M. le Curé tonne, la paysanne prie, baise avec ferveur son chapelet, et quoique l’orage l’affole, elle demande au ciel une chute de foudre sur nos têtes.

La paysanne avare peut même s’arracher du cœur quelques sous afin que son fils absent fasse le voyage et vote contre l'ennemi.

L’une d’elles, qui défend et déteste à la fois, ce qui n’est pas rare, M. le curé, disait de lui : « Pourvu que ce vieux propre à rien vienne voter au moins ! »