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BUCOLIQUES


quille. Aucune chute n’est à craindre.

Comme j’attrape un poisson, Berthe tire aussi sa ficelle et dit :

— Est-ce qu’il y en a un après la mienne ?

— Non, tu as dû le manquer. Repose ta ligne.

Elle la pose à peine et tire de nouveau.

— Regarde, dit-elle, sûr, il y en a un cette fois.

— Petite sotte, lui dis-je, tu pèches trop vite ! Donne au poisson le temps de mordre, et laisse ta ligne dans l'eau.

— Dieu merci, dit Berthe, ma ficelle est pourtant assez mouillée.

Elle patiente encore un tout petit peu, puis, libre de ne plus pêcher si ça l’ennuie, elle quitte la place et va vers l’arrosoir où je jette mes poissons. Les uns, vifs, nagent au fond et tournent comme si l’arrosoir était un cirque ; les autres, oppressés, de guingois, bâillent à fleur d’eau. Et c’est ce qui amuse le plus Berthe, de les voir ouvrir et fermer lentement la gueule.

— Ils avaient soif, dit-elle.