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BUCOLIQUES



Jamais peut-être mon amie n’a brillé de plus d’éclat. Sa joue reflète un soleil couchant ; ses lèvres orageuses sont deux cerises oubliées par les oiseaux, ses dents deux fines rampes lumineuses, et ses yeux vagabondent à la pêche au feu.

Elle m’excite, mon amie.

— Viens donc ! lui dis-je.

Elle ne s’enfuit pas.

— Plus près !

Comme elle obéit ! Riche fleur d’un soir d’été fraîchement arrosée, comme elle s’incline ! Et je la regarde, muet, avec la triste ardeur d’un ivrogne qui fixe un verre plein, et je veux la prendre.

— Chut ! dit-elle.

Elle entend un bruit de tonnerre lointain.

J’écoute aussi, et un nouvel avertissement gronde.

C’est fini. Rien ne presse plus. Séparons-nous.