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mes lettres précédentes, mon Ernest bien-aimé, je te demande d’achever ton voyage sans te détourner : il faut que je poursuive le traitement commencé, et je ne puis songer à notre réunion que pour la fin de juillet ou les premiers jours d’août. Mais pas plus tard que cette époque, mon Ernest ; si le froid me surprenait ici (et en ces contrées il se fait sentir dès la fin d’août), je ne sais plus ce que je deviendrais. Au commencement d’août, à Berlin, n’est-ce pas, très cher ami ?

Ne t’afflige pas de ce que je te dis, mon excellent Ernest ; en somme, je suis réellement mieux, quoique j’aie encore des heures mauvaises. Afin que mes lettres fussent plus rassurantes, je voudrais pouvoir t’écrire le matin, à mon bon moment ; mais j’en suis empêchée par l’obligation de marcher en me levant pendant deux ou trois heures, en avalant des flots de petit-lait. Dans cinquante jours nous serons réunis, très cher, ou du moins tout à la veille de l’être. Ah ! cette douce idée ranime encore tout mon pauvre être abattu ! Te revoir, te revoir, est depuis plus de quatre mois le vœu continuel de mon âme. — J’ai reçu une nouvelle lettre de mademoiselle Ulliac ; sa mère va mieux, on espère que le danger est passé. Ma bonne amie s’est préoccupée de me chercher un logement sain et convenable, pour les quelques jours que je passerai à Paris avant d’aller à Saint-Malo. Il y a, dit-elle, en face de la maison qu’elle habite, une pension bourgeoise habitée et tenue par d’honnêtes gens qu’elle connaît ; elle espère