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quatre ou cinq mois plus tard. Mais, je t’en prie, posons dès à présent une limite fixe, que rien ne puisse désormais déranger, et qui nous fasse trouver léger chaque jour qui nous en rapprochera. Et puis combien n’est-il pas nécessaire pour nos projets et nos arrangements que nous ayons ainsi un point fixe au moins un an à l’avance ?

Bien qu’en toute hypothèse, chère amie, notre réunion ne puisse être plus éloignée, combien je regrette maintenant de n’avoir pas accueilli avec plus de hâte ton projet de voyage à Venise ! Figure-toi, ma bien-aimée, que ce voyage me devient très nécessaire : en explorant un fonds de manuscrits vénitiens transportés à Rome, j’y ai trouvé tant de choses pour mon histoire de l’averroïsme, que je vois que je me priverais de documents essentiels, en ne visitant pas Bologne, Padoue et Venise qui furent les centres de l’averroïsme à la Renaissance. Les suppléments que m’accorde le ministère me permettent d’ailleurs ce voyage. Il est donc bien probable que dans quinze jours je prendrai la route des légations  ; je ferai quelque séjour dans les trois villes susdites, et aussi un peu à Ravenne, qui m’intéresse si vivement pour mon étude sur le grec au Moyen age. Milan et Turin seront un peu sacrifiés. Il y a, comme tu sais, beaucoup de chemins de fer en Lombardie, ce qui rend ce voyage assez facile. Si je ne trouve pas de compagnons pour prendre le vetturino, je prendrai la diligence qui