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Prusse, j’ai près d’elle un point d’appui ; son mari m’accompagnerait quelque peu, si je le lui demandais, ou du moins il me faciliterait le voyage. — Très cher Ernest, tu sentiras bien que tout cela ne balance en aucune manière le bonheur de te voir un peu moins tardivement, de parcourir avec toi les beaux lieux que tu colorerais à mes regards d’un double charme ; mais je m’arrête devant la dépense. — Pardonne-moi  ; je suis obligée de m’y arrêter, cher ami. D’ailleurs je voudrais aussi te laisser accomplir ta mission, sans te détourner d’un seul pas, sans t’obliger à me consacrer le moindre de tes instants. — je pense que la prochaine missive de maman renfermera une lettre de ma malheureuse amie, et de son médecin, M. Leduc. Suivant ce que m’apprendront ces lettres, je me déterminerai à dire au comte, dans le courant de janvier, que je projette de rentrer en France au printemps prochain. Je pressens les graves objections qu’il va me faire, j’en sens la justesse. De mon côté, je lui alléguerai la maladie de ma pauvre amie qui m’appelle avec des accents si douloureux ; se rendra-t-il ? éviterai-je des tiraillements ou quelque irritation dans cette rupture ? — Mon Dieu, Ernest, jouis en paix du bonheur de voir Rome et de l’habiter, et ne t’occupe pas de tous ces ennuis que tu ne peux en rien alléger. Je ferai de mon mieux, je te l’assure, c’est-à-dire que je n’épargnerai aucun effort pour arriver au plus vite, mais considère, je t’en prie, la dépense du voyage par le Midi, et ne trouve