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cents francs d’agrégé et de ce que j’ai inséré au Journal de l’Instruction Publique. C’est à peine si j’ai donné deux ou trois mois de leçons particulières. Je déteste profondément cette manie de faire argent de la production littéraire ; toutefois, en l’acceptant comme une dure nécessité, on peut noblement s’y résigner. Tous les journaux ont l’habitude de consacrer des bulletins aux sciences physiques. Pourquoi les sciences historiques, l’érudition comme on dit, l’histoire savante, la linguistique, l’histoire littéraire, la haute critique, l’archéologie, etc., n’ont-elles nulle part de bulletins analogues ? Je voudrais essayer de fonder cela, et de relever ces sciences en montrant leur but et leur unité (sciences de l’humanité). Peut-être essaierai-je, après la publication de mon livre, quelques articles de ce genre dans la Presse, qui seraient à l’Académie des Inscriptions ce que les autres bulletins sont à l’Académie des Sciences. Je n’aime pas beaucoup Girardin, mais c’est un homme d’essais, et ouvert à toutes les idées neuves.

Nous voilé dans une situation assez satisfaisante, chère amie, et tu dois être contente. Certes il y aurait bien à dire sur le détail, et surtout sur cette croisade papale. Je te renvoie là-dessus aux Débats. Mais enfin nous avons le calme, une réaction tolérable, l’assurance contre les coups d’État durant les trois années ; enfin un état à peu près comme avant février. La seule chose déplorable, mais dont le public ne se soucie guère,