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compliments et pourtant jamais l’école n’avait été jusqu’à une telle hardiesse (profondément respectueuse, bien entendu, et plus respectueuse que l’adoration).

Jacques lui-même en était étourdi. On m’a porté de bien encourageantes paroles de M. de Rémusat. Causant avec Simon de mon article, qui a presque rempli deux numéros, et demandant qui j’étais : « Si c’est un homme âgé, ajouta-t-il, je ferai quelques critiques : si c’est un jeune homme, c’est parfait. » M. Cousin, qui a répudié Bersot, jadis son secrétaire intime, pour je ne sais quelle petite hérésie inaperçue dans ses pages d’un de ses livres, ne m’a qu’un peu grondé, et encore d’un ton très paterne, et en faisant mille compliments sur le talent de l’article. M. Quinet, qui avait déjà traité le même sujet il y a dix ans dans la Revue des Deux Mondes, lors de la première apparition du livre de Strauss, m’a reçu à bras ouverts. T’ai-je déjà dit que j’avais fait la connaissance de M. Michelet ? Cela me l’a fait renouveler, beaucoup plus intime. Enfin cet article, qui, fait à demi et avec une critique malingre et cauteleuse, m’eût valu une disgrâce, fait franchement et largement, ne m’a valu que des éloges. J’ai reçu par le bureau de la Revue plusieurs témoignages de sympathie des provinces et spécialement des parties allemandes et protestantes de la France.

J’ai passé hier l’après-midi avec M. Garnier à la campagne près de Sceaux. Il m’y invite fort souvent, mais hier j’étais presque seul avec lui et