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que préjudiciable ou vue de cet avenir. Un ouvrage serait le meilleur titre : les excellents articles que tu donnes à mademoiselle Ulliac, complétés par d’autres, coordonnés entre eux, et enrichis au moyen des nouvelles sources que tu trouverais parmi nous, n’auraient-ils pas une unité suffisante ? As-tu quelques idées à toi, sur la possibilité de l’organisation de l’éducation des femmes, sur quelque chose qui fût pour elles ce que l’Université est pour les hommes ? Que cela serait actuel, et dans quelle pénurie nous sommes à cet égard ! Tu tracerais le programme, tu dessinerais les traits généraux, sans entrer bien entendu dans trop de détails. Tu sais que le ministre Carnot avait annoncé une réforme sur ce point. Il est permis de croire que la nouvelle institution n’eût pas été des plus libérales ; l’intention du moins était bonne, et je suis convaincu qu’on la reprendra. C’est une chose désolante qu’il n’y ait dans le système actuel aucune place officielle pour l’enseignement des femmes, que tout soit livré au caprice et à la mesquinerie des établissements particuliers. J’ai feuilleté quelques recueils de législation universitaire, et n’ai rien trouvé. Les maisons de la Légion d’honneur sont, je crois, dirigées par des congrégations religieuses, et les dames inspectrices, à ce que l’on m’a dit, ne reçoivent pas de traitement. Un vérité, s’il y avait eu quelque possibilité de ce côté, nous eussions pu tenter. Tu comprends au moins que pour faire naître et saisir les occasions, il faut que tu sois parmi nous.