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sera peut-être apercevoir, et il y aurait alors plus de convenance réelle à avoir attendu. Quant à ton travail pour l’Institut, en admirant la force de ton esprit et de ta volonté, je t’engage fortement à le poursuivre. Le concours pourrait être retardé ; mais, à moins de nouveaux et prochains bouleversements, je ne crois pas qu’il manque d’avoir lieu. D’ailleurs, mon ami, tôt ou tard un pareil travail te sera certainement utile. Dans mon chétif petit cercle, je n’ai jamais fait la moindre recherche qui, directement ou indirectement, ne m’ait été fructueuse… Ce que je dis, mon ami, de l’ouvrage que tu prépares pour le concours de l’Institut, je l’entends aussi pour tes thèses de doctorat. Poursuis donc, si tu le peux ; comment d’ailleurs remplacer l’étude pour quelqu’un qui sait s’y livrer ?

Donne-moi de tes nouvelles, mon bien cher ami ; tu pressentiras sans doute que j’en ai besoin. Donne des miennes à notre mère. — As-tu vu M. Garnier depuis les grands événements ?

Je reçois à l’instant de mademoiselle Ulliac une lettre qui me tranquillise un peu. Elle parait elle-même rassurée ; elle me dit que tu es bien portant ; elle m’affirme que Paris revient continuellement à un état moins agité. J’augure de là que tu n’en es pas sorti. Oh ! puissent mes sombres prévisions n’être que les rêves d’une imagination attristée ! Adieu, mon Ernest !… Par quels mots te dirai-