Page:Renan - Nouvelles lettres intimes 1846-1850, Calmann Levy, 1923.djvu/108

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Voilà donc, chère amie, le plan de mon travail pour l’année prochaine parfaitement arrêté, quelle que soit la position extérieure. Je serai content si j’ai pu passer mes deux thèses et me préparer à l’agrégation. Ce dernier concours, chère amie, demande peu de préparation spéciale, mais beaucoup de préparation générale. On pourrait voir en un mois toutes les matières indiquées sur les programmes ; mais ce qui ne peut s’improviser, et ce qui fait l’essentiel de cette épreuve, c’est l’habitude générale des matières philosophiques et la culture de l’esprit. Le travail de ma thèse sera donc loin de m’être inutile sous ce rapport, sans parler de l’appui extérieur prêté par le titre de docteur. Les expériences que je fais chez M. Jacques m’encouragent beaucoup. Ces messieurs s’étonnent que je ne me présente pas cette année ; et en effet je puis dire, sans vanité, que je ne suis pas inférieur à beaucoup d’autres, qui ont des chances raisonnables de succès.

Quant à mon ouvrage, chère amie, je reçois toujours les sollicitations les plus pressantes de le livrer à la publicité. Je persiste toutefois dans mon plan primitif, qui est d’attendre encore. On ne me reprochera pas d’avoir parlé trop tôt sur ces graves matières, quand je le ferai avec poids et mesure, et de manière à forcer les gens à le prendre en considération, et à ne pas s’en sauver par des fins de non-recevoir. D’ailleurs, chère amie, il est essentiel que ce travail soit imprimé à l'imprimerie royale ; nul éditeur