Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/498

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

472 MELANGES D’HISTOIRE.

jamais leur jugement, car ils comparaient toujours ce temps ; l’époque saine et classique, aux Pères de l’Église en fait de christianisme, aux grands écrivains grecs et latins en fait de littérature. Ils n’aiment pas le moyen âge, et néanmoins ils l’étudient avec un soin minutieux, car, pour les natures studieuses et savantes, le goût personnel n’est rien ; pour elles, tout ce qui vient du passé est également digne d’intérêt.

Ce fut ce qui arriva pour M. Le Clerc. Cet humaniste, nourri de la plus fine fleur de l’élocution antique, ce professeur d’un goût essentiellement classique, ce critique dominé jusqu’à l’excès peut-être par les idées littéraires des anciens rhéteurs latins, laissa là tout à coup ses auteurs favoris pour une littérature qu’il trouvait barbare et rebutante, pour des chroniques mal écrites, des scolastiques arides, des vers latins détestables, des sermons souvent ridicules. Exemple frappant d’une vie partagée entre deux objets poursuivis tous les deux avec la même passion ! À peine désigné par l’Académie, il se mit aux recherches avec ardeur. La commission apprécia bientôt du reste son collaborateur nouveau. Presque le lendemain de son admission, M. Daunou ayant résigné ses fonctions « d’éditeur », ce titre fut déféré à M. Le Clerc. L’Histoire littéraire fut dès lors son travail par excellence, son occupation de tous les instants. Vers le même temps, M. Fauriel apportait à la commission sa vive intelligence de la littérature populaire, le sentiment profond qu’il avait des origines, son goût pour les problèmes difficiles d’histoire littéraire. Une ère nouvelle sembla s’ouvrir pour le recueil, et sûrement dom Rivet, paraissant dans le docte cabinet où se conservent ses papiers