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MÉLANGES D’HISTOIRE.

bile paraît de la sorte un des traits essentiels de la race berbère et une des suites de l’impuissance qu’elle a toujours montrée pour se créer des dynasties nationales.


IV.


Nous venons d’exposer, d’après d’excellents observateurs, un système social qui, durant des milliers d’années, a paru une garantie suffisante à toute une fraction de l’espèce humaine. Par quelques côtés, ce système a de l’analogie avec celui de toutes les peuplades patriarcales et à demi nomades qui, sans dépasser la vie de la tribu, sont arrivées à une certaine civilisation. Il ne faut pas, en pareille matière, exagérer l’idée de race. La race, en ce qui concerne les lois et les coutumes, est primée par le genre de vie et surtout par le degré de culture. Ce que nous savons de la constitution fédérale des Gaulois rappelle singulièrement l’état social que nous voyons exister encore chez les Berbères. La vie de l’Arabe bédouin a beaucoup d’analogie avec celle du Touareg. Les Kirghiz ont des mœurs fort analogues à celles que nous voyons attribuées dans la Genèse aux ancêtres supposés du peuple hébreu, et pourtant il n’y a aucune communauté de race entre les Gaulois, les Berbères, les Arabes, les Kirghiz. De telles analogies viennent moins d’une consanguinité que d’une similitude d’état social et d’une façon identique d’entendre l’autorité du village ou de la tribu comme une extension de celle de la famille. Les races sont des moules d’éducation morale encore plus qu’une