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et en Italie. Ce qui le prouve, c’est que le seul pays en deçà des monts où nous trouvions le germe d’un mouvement d’art comparable à celui de l’Italie, la Flandre, est aussi le seul où fleurissent des petites républiques à peu près indépendantes. Ces États, concentrés en quelques milliers d’hommes, produisent une activité merveilleuse, et favorisent le développement des écoles locales. Des villes de troisième et de quatrième ordre, en Italie, ont une école marquée d’un caractère propre, n’empruntant rien aux autres, ne sortant pas des murs de la cité, donnant à celle-ci sa physionomie à part. À partir du xive et du xve siècle, les écoles, entendues comme des centres distincts où l’art se développe d’une façon indépendante, s’effacent presque parmi nous. Certaines spécialités, par exemple celle de l’orfèvrerie et des émaux de Limoges, se défendent seules avec obstination. Une sorte d’éclectisme est dès cette époque la loi de l’art français. Chaque artiste a son point de départ dans la mode générale de son temps, non dans la manière particulière du maître qui l’a précédé.

La cour constitue en France, depuis le xive siècle, le principal foyer de la culture de l’art. Il semble au premier coup d’œil que, sous ce rapport, les derniers temps du moyen âge furent très-bien partagés. Au commencement comme à la fin de leur long règne, au xive comme au xvie siècle, les Valois se distinguèrent par leur goût délicat. L’historien de l’art n’est pas toujours amené à porter sur certains personnages les mêmes jugements que l’historien de la politique et des mœurs. Tel tyran des villes d’Italie, souillé de crimes et digne des malédictions de la postérité, occupe dans l’histoire de l’art une place hono-