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d’analogie qu’offrent au premier coup d’œil Saint-Paul-hors-les-Murs et Notre-Dame, l’une de ces constructions vient de l’autre par une série de développements non interrompus.

On ne nie pas qu’une influence grecque assez forte ne se soit exercée en France au xe et au xie siècle ; mais cette influence entra pour peu de chose dans le grand mouvement de notre art national. Elle produisit Saint-Front de Périgueux, quelques églises du Quercy et de l’Angoumois ; mais ce n’est certes pas de ce côté qu’il faut chercher l’origine de l’art gothique. Encore moins doit-on parler des croisades et de l’influence arabe. L’architecture gothique et l’architecture arabe ont des ressemblances ; mais ces ressemblances viennent de la similitude de leurs points de départ. L’une sort du roman, l’autre du byzantin ; or le roman et le byzantin étaient frères, issus tous deux par dégradation de l’art antique. Le gothique et l’arabe arrivèrent ainsi à des résultats analogues ; mais ils ne se doivent rien l’un à l’autre et représentent des tendances profondément différentes. L’ogive a existé de tout temps en Orient à l’état sporadique, l’Orient même en adopta l’usage général avant l’Occident ; mais ce n’est pas de là que les grands constructeurs du xiie siècle la prirent. Ils y arrivèrent d’eux-mêmes, et indépendamment de tout emprunt fait au dehors.

C’est donc un seul développement qui a produit les églises romanes et les églises gothiques. Tout se rattache au mouvement de construction qui part de l’an 1000, produit nos belles églises romanes, arrive vers 1150 à l’ogive et vers 1200 à un type mûr, fixe, parfait à sa manière, qui ne varie plus jusqu’au xve siècle. Une seule grande révo-