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gène[1] qui niait la création et admettait une matière éternelle. Il commenta les Évangiles et en fit, dit-on, une Concorde ou Harmonie[2]. Son principal ouvrage, qui nous a été conservé, fut un traité en trois livres adressé à un certain Autolyque[3], personnage probablement fictif, sous le nom duquel Théophile représente le païen instruit, retenu dans l’erreur par les préjugés répandus contre le christianisme. Selon Théophile, on est chrétien par le cœur ; ce sont les passions et les vices qui empêchent de voir Dieu. Dieu est immatériel et sans forme ; mais ses œuvres le révèlent. Les dieux des païens sont des hommes qui se sont fait adorer, et les pires des hommes[4].

Théophile parle déjà de trinité ; mais sa trinité n’a que l’apparence de celle de Nicée ; elle se compose

  1. Voir ci-dessus, p. 126. C’est l’Hermogène que Tertullien prend si fort à partie dans un traité spécia], In Hermogenem, et dans ses différents écrits, Præscr., 30, 33 ; De monog., 16 ; De anima, 1. Cf. Clém. d’Alex., Exc. ex script. proph., 56 ; Théodoret, Hær. fab., I, 19 ; Philastre, 54.
  2. Saint Jérôme, qui seul parle de cette Harmonie, confond peut-être Théophile et Tatien.
  3. L’ouvrage a été écrit plusieurs années après l’an 180, puisque l’auteur cite Chrysérôs, qui écrivit lui-même après l’an 180 (III, 27, 28). La persécution durait encore, quoique affaiblie (III, 30) ; Irénée paraît avoir connu l’ouvrage de Théophile. Cf. Ad. Harnack, Die Zeit des Ignatius (Leipzig, 1878), p. 42-44.
  4. Ad Autol., I, 9 ; III, 3, 8.