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mandaient à grands cris, comme s’il eût dépendu de lui de lui rendre la parole. Les journaux français, s’ils parviennent jusqu’à toi, t’auront sans doute porté le retentissement lointain de ces querelles d’école.

Mon Dieu ! ma chère amie, je m’endors dans ces longues causeries, et pourtant une pensée cruelle vient en troubler la douceur. Peut-être celle à qui je les adresse est maintenant souffrante, épuisée. Qui sait si elle pourra seulement les lire !!... Compare les dates, chère amie : aujourd’hui 16 décembre, et ta dernière lettre du 28 octobre, qui semblait m’en promettre une autre dans un terme assez rapproché ! J’attends, j’attends avec impatience : l’heure du courrier est tous les jours pour moi une heure solennelle. Maman et notre frère partagent aussi mon inquiétude.

Notre bonne mère est bien, et je vois avec plaisir qu’elle trouve l’occasion de faire de petits voyages à Lannion et à Guingamp, lesquels servent un peu à la distraire. Elle me croit encore à Stanislas, et je ne puis lui colorer ma sortie de cette maison que quand