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Henriette, il est temps que ce cœur si aimant se voie entouré de cœurs qui lui répondent ; il est temps que ce corps affaibli par les sacrifices reçoive les soins de ceux pour qui il a tant souffert. — Autre raison, chère amie, qui depuis longtemps me préoccupe, et sur laquelle aussi mademoiselle Ulliac insistait beaucoup. C’est l’état politico-religieux de cette Pologne. Je ne pouvais t’en parler tandis que tu y étais ; mais combien de fois j’ai frissonné en lisant les journaux, et songeant que mon Henriette était là ! Tu comprends sans que j’en dise davantage. Y retourne qui veut, mais une Française n’y peut plus revenir.

Je reviens aux considérations financières ; car là, je le crains, sera le fort du combat. Mais serions-nous obligés durant quelque temps de subvenir péniblement au présent, l’avenir compenserait. Mademoiselle Ulliac paraît ne manquer de rien, excepté de fonds. Eh bien ! faudrait-il pour commencer l’exécution des projets communs, vendre notre petit patrimoine, qui empêcherait ? Nos deux parts réunies feraient encore quelque chose, et maman le verrait avec plaisir, si elle pouvait