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premiers jours qui suivraient mon retour au séminaire, c’est-à-dire les premiers jours de novembre. C’est sans doute une erreur, puisqu’en effet je ne l’ai pas reçue ; il me sera arrivé ce qui arrive bien souvent, c’est de prendre mes désirs pour des réalités et, à force de souhaits, d’arriver à espérer. Mon attente voyage ainsi d’un courrier à l’autre, et l’heure des visites, auparavant si indifférente pour moi, réveille tous les jours mon impatience, parce que j’espère qu’elle m’amènera le messager de mademoiselle Ulliac, qui déjà si souvent m’a porté la bonne nouvelle. J’espère bien qu’il ne tardera plus longtemps ; mais je n’ai pas voulu reculer plus longtemps le plaisir de m’entretenir de nouveau à loisir avec toi.

J’ai donc quitté notre bonne mère il y a environ six semaines. Je crois t’avoir déjà dit, ma bonne Henriette, quelle avait été ma joie en la retrouvant toujours la même pour la santé et la gaîté. Avec quel bonheur je l’entendais reconnaître elle-même le contraste de ses dernières années avec les jours si agités et si douloureux qui avaient jusqu’ici