Page:Renan - Lettres intimes 1842-1845, calmann-levy, 1896.djvu/169

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


VIII


MADEMOISELLE RENAN,
Palais Zamoyski, Varsovie (Pologne).


Paris, 16 avril 1844.

Ma bonne et chère Henriette,

Je viens me reposer quelques instants avec toi des études et des réflexions qui m’absorbent. Jamais peut-être je n’avais senti plus vivement le besoin de ce doux entretien qu’après six longs mois d’un isolement, qui pourrait paraître intolérable à celui qui ignore ce que peut l’habitude et l’assujétissement de l’esprit par la volonté, pour nous familiariser avec les situations les plus pénibles. Figure-toi que depuis que j’ai dit adieu à notre bonne mère, je n’ai pu trouver que dans tes lettres et dans les siennes cet échange d’affection véritable et désintéressée dont notre pauvre cœur a un besoin si impérieux. Pas un de ces chers entretiens, où deux cœurs se parlent