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loin la première. S’il faut te faire ma confession, voici le fait. Tu sauras qu’à l’époque où je commençai cette étude, les finances étant en souffrance, je vécus d’abord en parasite pour les livres, c’est-à-dire qu’au lieu d’acheter grammaire, dictionnaire, auteurs d’explication, etc., je me contentai de les emprunter à un de mes condisciples, qui avait fort cultivé cette étude. Mais il est arrivé par malheur que ce condisciple a quitté la maison, emportant avec lui toute ma bibliothèque allemande. Force donc m’a été d’interrompre pour un temps. Arrivé à Saint-Sulpice, j’aurais pu reprendre la suite de mes études ; mais comme j’avais ici l’avantage d’un cours spécial d’hébreu, fait avec un soin et un talent remarquables, tu comprends que j’ai dû préférer la seconde langue à la première, dans laquelle je n’eusse pu me diriger que par mes études particulières.

L’espace va bientôt me manquer, ma bonne Henriette, et je ne t’ai encore rien dit de la grave pensée qui occupe mon esprit, durant tous les instants où il n’est pas rempli par l’étude. Tu la devines sans peine. De nou-