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ses lieutenants les plus distingués[1], Marcius Turbo. On lui donna des forces de terre et de mer et une nombreuse cavalerie. Il fallut, pour venir à bout des forcenés, une guerre en règle, plusieurs combats. On en fit de vraies boucheries. Tous les juifs cyrénéens et ceux des juifs égyptiens qui s’étaient joints à eux furent égorgés[2]. Alexandrie, enfin débloquée, respira ; mais les dégâts de la ville avaient été considérables. Un des premiers actes d’Adrien, devenu empereur, fut d’en réparer les ruines et de s’en donner pour le restaurateur[3].

Tel fut ce mouvement déplorable, où les Juifs paraissent avoir eu les premiers torts, et qui acheva de les perdre dans l’opinion du monde civilisé. Le pauvre Israël tombait en folie furieuse. Ces horribles cruautés, si éloignées de l’esprit chrétien, agrandirent le fossé de séparation entre le judaïsme et l’Église. Le chrétien, de plus en plus idéaliste, se console de tout par sa douceur, son attente résignée. Israël se fait cannibale, plutôt que de tenir ses pro-

  1. Cf. Dion Cassius, LXIX, 18.
  2. Τραιανὸν ἐξολλύντα τὸ ἐν Αἰγύπτῳ Ἰουδαίων γένος. Appien., Bell. civ., II, 90. Cf. Talm. de Jér., Sukka, v, 1 ; Talm. de Bab., Sukka, 51 b ; Midrasch, Eka, i, 17.
  3. Eusèbe, Chron. (trad. arménienne), 1re année d’Adrien (édit. Schœne) ; Orose, VII, 12.