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les apocalypses revenaient sur l’idée de conflagrations finales. Il s’y joignait le soupçon permanent d’infamies secrètes, de réunions nocturnes, de séductions coupables sur des femmes, des jeunes filles, des enfants[1]. De là pour en venir à juger les chrétiens capables de tous les crimes et à leur attribuer tous les méfaits, il n’y avait qu’un pas à faire, et ce pas, la foule plus encore que la magistrature le franchissait tous les jours.

Qu’on ajoute à cela l’arbitraire terrible qui était laissé aux juges, surtout dans le choix de la peine[2], et l’on comprendra comment, sans lois d’exception, sans législation spéciale[3], a pu se produire ce désolant spectacle que nous présente l’histoire de l’empire romain à ses meilleures époques. La loi sera appliquée avec plus ou moins de rigueur ; mais elle reste la loi. Cet état durera comme une petite fièvre lente durant le iie siècle, avec des intervalles d’exaspération et de rémission au iiie siècle. Il se terminera par l’accès terrible des premières années du ive siècle, et sera clos définitivement par l’édit de Milan de 313.

  1. Tatien, Adv. gentes, 33 ; Min. Félix, Octav., 8, 9, 28.
  2. Digeste, l. 6, Ad leg. Jul. pecul. (XLVIII, 13) ; cf. l. 4, § 2.
  3. Voir cependant Lactance, Inst. div., V, 11, et l’essai de M. Le Blant pour rétablir le De officio proconsulis d’Ulpien (Comptes rendus de l’Acad. des inscr., 1866, p. 358 et suiv.).