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paix du monde seront facilement dissoutes ; la division les réduira en poussière. L’autorité de l’État peut seule faire cesser les schismes dans les corps de ce genre ; la neutralité de l’État les rend incurables. Le système libéral est le plus sûr dissolvant des associations trop puissantes. Voilà ce que de nombreuses expériences nous ont appris. Mais Trajan et Marc-Aurèle ne pouvaient pas le savoir. Leur erreur en ceci, comme sur tant d’autres points où nous trouvons leur œuvre législative défectueuse, était de celles que les siècles seuls pouvaient corriger.

La persécution à l’état permanent, tel est donc le résumé de l’ère qui s’ouvre pour le christianisme[1]. On a pensé qu’il y eut un édit spécial ainsi conçu : Non licet esse christianos[2], lequel aurait servi de base à toutes les poursuites contre les chrétiens. Cela est possible ; mais cela n’est point nécessaire à supposer. Les chrétiens étaient, par le seul fait de leur existence, en contravention avec les lois sur les associations[3]. Ils étaient coupables de sacrilège, de lèse-ma-

  1. Cf. Lactance, Instit. div., V, 11. Pour Porphyre (dans Eus., H. E., VI, xix, 7), χριστιανῶς et παρανόμως sont synonymes.
  2. Justin, Apol. I, 11 ; Sulp. Sév., Chron., II, 29 ; Tertullien, Apol., 4 ; Origène, Homel. x In Josue, § 10 ; Lampride, Alex. Sév., 22 ; Lactance, De mort. persec., 34. Voir Boissier, Revue archéol., juin 1876.
  3. Voir les textes dans les Apôtres, p. 354 et suiv.