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pereurs du iie siècle que des coups de fureur que lui portèrent les scélérats du ier. Les violences de Néron, de Domitien, ne durèrent que quelques semaines, quelques mois ; elles furent ou des actes de brutalité passagère ou des vexations, fruit d’une politique fantasque et ombrageuse. Dans l’intervalle qui s’écoule depuis l’apparition du christianisme jusqu’à l’avènement de Trajan, on ne voit pas une seule fois invoquer contre les chrétiens une loi qui les constitue à l’état de délinquants. La législation sur les collèges illicites existait déjà en partie ; mais on ne l’appliquait pas avec autant de rigueur que l’on fit plus tard. Au contraire, le régime très-légal, mais très-gouvernemental (comme on dit aujourd’hui) des Trajan, des Antonins, sera plus oppressif pour le christianisme que la férocité et la méchanceté des tyrans[1]. Ces grands conservateurs de la chose romaine aper-

  1. Les apologistes, il est vrai, ne sont pas de cet avis. Pour Tertullien, c’est Néron, c’est Domitien qui ont été les seuls persécuteurs dans toute la force du terme ; les bons empereurs se sont montrés relativement favorables au christianisme (Apol., 5). Méliton exprime la même pensée (Fragm. dans Eus., H. E., IV, xxvi, 9 et suiv., μόνοι πάντων). Lactance présente les choses de la même façon (De mort. persec., c. 3). Comp. Théodoret, De cura græc. aff., serm. ix, p. 612, Paris, 1642. On sent là une petite habileté oratoire et le parti systématique de présenter les alternatives de paix ou de persécution de l’Église comme répondant aux alternatives de splendeur ou de misère de l’empire.