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vainement d’améliorer cette race détestable[1]… » Une accusation surtout, celle de haïr tout ce qui n’était pas eux[2], était meurtrière ; car elle reposait sur des motifs spécieux et de nature à égarer l’opinion. Plus dangereuse encore était l’idée d’après laquelle le prosélyte qui s’attachait au mosaïsme recevait pour première leçon de mépriser les dieux, de dépouiller tout sentiment patriotique, d’oublier ses parents, ses enfants, ses frères[3]. Leur bienfaisance, disait-on, n’est qu’égoïsme ; leur moralité n’est qu’apparente ; entre eux tout est permis[4].

Trajan, Adrien, Antonin, Marc-Aurèle se tiennent ainsi, à l’égard du judaïsme et du christianisme, dans une sorte d’éloignement hautain. Ils ne les connaissent pas, ne se soucient pas de les étudier. Tacite, qui écrit pour le grand monde, parle des juifs comme d’une curiosité exotique, totalement ignorée de ceux à qui il s’adresse, et ses erreurs nous surprennent. La confiance exclusive de ces nobles esprits dans la discipline romaine les rendait insouciants d’une doctrine qui se présentait à eux

  1. Tac., Hist., V, 8.
  2. Tac., Hist., V, 5.
  3. Tac., Hist., V, 5. Voir le passage de Juvénal cité ci-dessus, p. 235.
  4. « Inter se nihil inlicitum. » Tac., Hist., V, 6.