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Fabianus[1], Sénèque, donnent le modèle d’une philosophie active et pratique, employant tous les moyens, la prédication, la direction des consciences, pour la propagande de la vertu[2]. La noble lutte des philosophes contre Néron et Domitien, leurs bannissements, leurs supplices achevèrent de les rendre chers à la meilleure société romaine. Leur crédit va toujours grandissant jusqu’à Marc-Aurèle, sous lequel ils règnent. La force d’un parti est toujours en proportion du nombre de ses martyrs. La philosophie avait eu les siens. Elle avait souffert, comme tout ce qui était noble, des abominables régimes qu’on avait traversés ; elle bénéficia de la réaction morale provoquée par l’excès du mal. Alors naît une idée, chère aux rhéteurs, le tyran ennemi-né du philosophe, le philosophe ennemi-né du tyran[3]. Tous les

  1. Sénèque, Epist., 52, 59, 62, 64, 66, 67, 73, 93, 98, 100, 108, 110 ; De ira, III, 36 ; Quæst. nat., VII, 32 ; De provid., 3, 5. Sénèque le Rhét., Controv., II, præf.
  2. « Disserebat populo Fabianus. » Sén., Épîtres, 52. Cf. ép. 100.
  3. Voir surtout, dans la Vie d’Apollonius de Philostrate, la façon dont l’auteur insiste sur le rôle brillant du philosophe, en lutte avec les mauvais empereurs, honoré de leur haine personnelle, persécuté nommément par eux, puis, à partir de Nerva, recherché, flatté, ayant ses entrées particulières au palais. Voir aussi du même Vies des soph., I, vii ; Lucien, Nero seu de isthmo ; Arrien, Dissert. Epict., I, viii, 12 ; Spartien, Adrien, 16 ; Thémistius, Orat. 5, ad Jov. imp., p. 63, édit. Hardouin.