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Aurèle ; mais il l’égalait en sagesse pratique, en bienveillance[1]. Sa ferme croyance dans le libéralisme[2] ne se démentit jamais ; il montra par un illustre exemple que le parti héroïquement optimiste qui nous fait admettre que les hommes sont bons, quand il n’est pas prouvé qu’ils sont mauvais, peut se concilier avec la fermeté d’un souverain. Chose surprenante ! ce monde d’idéologues et d’hommes d’opposition, que la mort de Domitien porta au pouvoir, sut gouverner. Il se réconcilia franchement avec la nécessité, et l’on vit alors quelle chose excellente est la monarchie faite par des républicains convertis. Le vieux Verginius Rufus, ce grand citoyen qui avait rêvé toute sa vie la république, et qui fit tout ce qu’il put pour qu’elle fût proclamée à la mort de Néron, comme elle l’avait été à la mort de Caligula, Verginius, illustre pour avoir plusieurs fois refusé l’empire[3], était complètement rallié et servait de centre à cette société d’élite[4]. Le parti radical renonçait à sa chimère, et reconnaissait que, si le principat

  1. « Favorabilis, civilis animus. »
  2. Notez ses phrases habituelles : Non est ex justitia temporum nostrorum…, nec nostri seculi est (Corresp. de Pline et de Trajan, lettres 55, 97).
  3. Voir sa belle épitaphe républicaine, faite par lui-même. Pline, Lettres, VI, 10 ; IX, 19.
  4. Pline, Lettres, II, I ; Dion Cassius, LXVIII, 2.