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Les enthousiastes du xvie siècle s’en nourrirent. L’illuminée Antoinette Bourignon y voyait le plus beau des livres saints.

En réalité, peu de livres ont fourni autant d’éléments à la théologie chrétienne que cette œuvre antichrétienne. Les limbes[1], le péché originel[2], le petit nombre des élus[3], l’éternité des peines de l’enfer[4], le supplice du feu[5], les préférences libres de Dieu, y ont trouvé leur expression la moins adoucie ; si les terreurs de la mort ont été fort aggravées par le christianisme, c’est sur des livres comme celui-ci qu’il en faut faire peser la responsabilité. Ce sombre Office, si plein de rêves grandioses, que l’Église récite sur les cercueils, semble inspiré des visions ou, si l’on veut, des cauchemars de pseudo-Esdras. L’iconographie chrétienne elle-même emprunta beaucoup à ces pages bizarres pour tout ce qui touche à la représentation de l’état des morts. Les mosaïques byzantines[6] et les miniatures qui offrent l’image de la ré-

  1. Voir ci-dessus, p. 357.
  2. Ch. iii, 10, 21-22 ; iv, 30 ; vii, 10-11, 46, 48 ; Frag. Bensly, v. 70 ; viii, 34 et suiv.
  3. Voir ci-dessus, p. 360-361.
  4. Ch. ix, 9 et suiv.
  5. Ch. xiii, 38.
  6. Par exemple, celle de Torcello (photographiée par Naya, Venise).