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père, le frère pour son frère, l’ami pour son ami[1] ? » La réponse est terrible. « De même que, dans la vie présente, le père ne saurait donner procuration à son fils, le fils à son père, le maître à son esclave, l’ami à son ami, pour être malade, pour dormir, pour manger, pour être guéri à sa place ; de même ce jour-là personne ne pourra intervenir pour un autre ; chacun portera sa propre justice ou sa propre injustice. » Esdras objecte en vain à Uriel les exemples d’Abraham et d’autres saints personnages qui ont prié pour leurs frères[2]. Le jour du jugement inaugurera un état définitif, où le triomphe de la justice sera tel que le juste lui-même ne pourra avoir pitié du damné[3]. Certes nous sommes avec l’auteur quand il s’écrie après ces réponses, censées divines :


Je l’ai déjà dit, et je le dirai encore : « Mieux eût valu

  1. Fragm. Bensly, v. 102 et suiv. C’est ici certainement le motif pour lequel le feuillet contenant ce passage a été coupé dans le manuscrit de la traduction latine (Paris, fonds de Saint-Germain, maintenant no 11505, écrit l’an 822) d’où sont provenus tous les autres manuscrits que l’on connaît, excepté celui d’Amiens. Le moyen âge tenait beaucoup à la prière pour les morts ; or le passage dont il s’agit en était la négation directe et servait de base à l’erreur de Vigilance (saint Jérôme, Ad Vigil., c. 10, Opp., IV, 2e part., col. 283, 284, Mart.). Cf. saint Ambroise (De bono mortis, c. 10, 11, 12 ; Épître 34, ad Horontianum, Opp., t. II, col. 921-924).
  2. Ch. vii, 36 et suiv.
  3. Ch. vii, 45 (versions syr. et éthiop.).