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que sous Néron, ils aient été persécutés de compagnie. Comme dit Tertullien[1], ce que de tels monstres condamnèrent dut être quelque chose d’excellent. Il est un comble de méchanceté dans le gouvernement qui ne permet pas au bien de vivre, même sous sa forme la plus résignée. Le nom de philosophe impliquait dès lors une profession de pratiques ascétiques, un genre de vie particulier, un manteau. Ces espèces de moines séculiers, protestant par leur renoncement contre les vanités du monde, furent, durant tout le ier siècle, les plus grands ennemis du césarisme. La philosophie, disons-le à sa gloire, ne prend pas facilement son parti de la bassesse de l’humanité et des tristes conséquences que cette bassesse entraîne dans la politique. Héritiers de l’esprit libéral de la Grèce, les stoïciens de l’époque romaine rêvaient des démocraties vertueuses, dans un temps qui ne comportait que la tyrannie[2]. Les politiques, qui ont pour principe de se renfermer dans les bornes du possible, avaient naturellement une forte antipathie contre une telle manière de voir. Tibère a déjà les philosophes en aversion. Néron (en 66) chassa ces importuns, dont la présence était pour sa vie un per-

  1. Apolog., 5.
  2. Exemple de Maternus. Dion Cass., LXVII, 12. Lire surtout Philostrate, Vie d’Apollonius.