Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/313

Cette page a été validée par deux contributeurs.

L’arbre infructueux ne doit pas être trop vite coupé ; un bon vigneron s’oppose aux emportements du propriétaire, et demande à fumer la terre au pied de l’arbre malheureux avant de le condamner tout à fait[1]. L’Évangile de Luc est par excellence l’Évangile du pardon et du pardon obtenu par la foi. « Il y a plus de joie dans le ciel pour un pécheur qui fait pénitence que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de pénitence[2] ». « Le Fils de l’homme est venu, non pas perdre les âmes, mais les sauver[3] ». Toutes les détorses lui sont bonnes pour faire de chaque histoire évangélique une histoire de pécheurs réhabilités. Samaritains, publicains, centurions, femmes coupables, païens de bonne volonté, tous les méprisés du pharisaïsme sont ses clients. L’idée que le christianisme a des pardons pour tout le monde est bien la sienne. La porte est ouverte ; la conversion est possible pour tous. Il ne s’agit plus de la Loi ; une dévotion nouvelle, le culte de Jésus, l’a remplacée. Ici, c’est le Samaritain qui fait la bonne action, tandis

  1. Luc, xiii, 6-9. Il y a là probablement une allusion aux juifs qui, en présence de Jésus, sont restés stériles, mais que la prédication apostolique améliorera peut-être.
  2. Luc, xv, 7.
  3. Luc, ix, 54 (authenticité douteuse) ; mais Luc, xix, 20, est certain, et paraît avoir été interpolé dans Matth., xviii, 11.