va plus loin encore : il prie pour ses bourreaux, « qui ne savent ce qu’ils font ». Dans Matthieu[1], Jésus semble malveillant pour la Samarie, et recommande à ses disciples d’éviter les villes des Samaritains comme la voie des païens. Chez Luc, au contraire, Jésus est en rapports fréquents avec les Samaritains ; il parle d’eux avec éloge[2]. C’est au voyage en Samarie que Luc rattache une foule d’enseignements et de récits. Loin d’emprisonner Jésus en Galilée, comme Marc et Matthieu, Luc obéit à une tendance antigaliléenne et antijudaïque, tendance qui sera plus visible encore dans le quatrième Évangile. À beaucoup d’autres égards, l’Évangile de Luc forme une sorte d’intermédiaire entre les deux premiers Évangiles et le quatrième, qui semble d’abord n’avoir aucun trait d’union avec eux[3].
À peine est-il une anecdote, une parabole propre à Luc qui ne respire cet esprit de miséricorde et d’appel aux pécheurs. La seule parole un peu dure qui ait été conservée de Jésus[4] devient chez lui un apologue plein d’indulgence et de longanimité.