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pas ces explications de coutumes et ces notes topographiques qu’on trouve dans Marc. Au contraire, il a des traits qui, dénués de sens à Rome, avaient de l’intérêt en Orient[1]. On peut donc supposer que notre Évangile fut rédigé quand l’Évangile de Marc, composé à Rome, arriva en Orient. Un Évangile grec parut une chose précieuse ; mais on fut frappé des lacunes de celui de Marc ; on le compléta. L’Évangile qui résulta de ces additions mit du temps à revenir à Rome. Par là s’explique que Luc ne l’ait pas connu, dans cette ville, vers 95.

Par là s’explique aussi que, pour relever l’écrit nouveau, et opposer au nom de Marc un nom d’une autorité encore supérieure, on ait attribué le texte dont il s’agit à l’apôtre Matthieu. Matthieu était un apôtre judéo-chrétien, menant une vie ascétique analogue à celle de Jacques, s’abstenant de chair, ne vivant que de légumes et de pousses d’arbre[2]. Peut-être sa qualité d’ancien publicain fit-elle penser que, habitué à écrire, il avait dû plus qu’un autre songer à fixer des faits dont il était censé avoir été témoin. Certes Matthieu ne fut pas le rédacteur de

  1. Comp. Matth., iii, 5, et Marc, i, 5 ; Matth., iv, 25, et Marc, iii, 7-8 ; Matth., xix, 1, et Marc, x, 1. Notez le trait palestinien sur Haceldama, xxvii, 8.
  2. Clément d’Alex., Pædag., II, 1.