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croyaient savoir les meilleurs traditionistes de l’Orient.

Ce fut l’origine de notre texte dit « selon Matthieu »[1]. L’auteur de cet écrit a pris pour base de son travail l’Évangile de Marc. Il le suit dans l’ordre, dans le plan général, dans les expressions caractéristiques, d’une façon qui ne permet pas de douter qu’il n’eût sous les yeux ou dans la mémoire l’ouvrage de son devancier. Les coïncidences dans les moindres détails durant des pages entières sont si littérales, qu’on est par moments tenté d’affirmer que l’auteur possédait un manuscrit de Marc[2]. D’un autre côté, certains changements de mots, de nombreuses transpositions, certaines omissions dont il est impossible d’expliquer le motif, feraient plutôt

  1. La date approximative résulte : 1o du verset xvi, 28, qui devait être vrai encore à l’époque de la rédaction ; 2o de l’εὐθέως (xxiv, 29-30), qui empêche de trop s’éloigner de la guerre de Judée (comparez Luc, xxi, 24). La circonstance de l’Évangile prêché partout (xxiv, 14) ne donne rien de précis.
  2. Ainsi, dans les citations de l’Ancien Testament, l’accord est remarquable. Comp. Matth., xv, 8, et Marc, vii, 6 ; Matth., xix, 5, et Marc, x, 7 ; Matth., xxi, 13, et Marc, xi, 17 ; Matth., xxii, 32, et Marc, xii, 26 ; Matth., xxii, 44, et Marc, xii, 36 ; Matth., xxi, 42, et Marc, xxii, 10-11 ; Matth., xxvi, 31, et Marc, xiv, 27 ; Matth., xxiv, 15, et Marc, xiii, 14. Pour comprendre ce que ces coïncidences ont de frappant, se rappeler que Jésus parlait araméen et non grec.