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sentirent le danger que leur apportaient ces forcenés. Elles se chargèrent elles-mêmes de les arrêter et de les livrer aux Romains. Beaucoup s’enfuirent jusque dans la haute Égypte, où ils furent traqués comme des bêtes fauves[1]. À Cyrène, un sicaire nommé Jonathas, tisserand de son métier, fit le prophète, et, comme tous les faux messies, persuada à deux mille ébionim ou pauvres de le suivre dans le désert, où il promettait de leur faire voir des prodiges et d’étonnantes apparitions[2]. Les Juifs sensés le dénoncèrent à Catulle, gouverneur du pays ; mais Jonathas s’en vengea par des délations, qui amenèrent des maux sans fin. Presque toute la juiverie de Cyrène, l’une des plus florissantes du monde[3], se vit exterminée ; ses biens furent confisqués au nom de l’empereur. Catulle, qui montra en cette affaire beaucoup de cruauté, fut désavoué par Vespasien ; il mourut dans d’affreuses hallucinations, qui, selon certaines conjectures, auraient fourni le sujet d’une pièce de théâtre à décors fantastiques, « le Spectre de Catulle[4] ». Chose incroyable ! Cette longue et terrible agonie ne fut pas immédiatement suivie de la mort. Sous

  1. Jos., B. J., VII, x, 1 ; Eusèbe, Chron., ad ann. 73.
  2. Jos., B. J., VII, xi, 1.
  3. Strabon, cité par Jos., Ant., XIV, vii, 2.
  4. Juvénal, sat. viii, v. 186.