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déré[1], on ne saurait nier que le bref discours mis par Tacite dans la bouche du capitaine victorieux ne soit, non-seulement pour le style, mais pour l’ordre des idées, un reflet exact des sentiments de Tacite lui-même. On a le droit de supposer que l’historien latin, plein contre les juifs et les chrétiens de ce mépris, de cette mauvaise humeur qui caractérise l’époque de Trajan et des Antonins, a fait parler Titus comme un aristocrate romain de son temps, tandis qu’en réalité le bourgeois Titus eut pour les superstitions orientales plus de complaisance que n’en avait la haute noblesse qui succéda aux Flavius[2]. Vivant depuis trois ans avec des Juifs, qui lui avaient vanté leur temple comme la merveille du monde, gagné par les caresses de Josèphe[3], d’Agrippa, et plus encore de Bérénice, il put très-bien désirer la conservation d’un sanctuaire dont plusieurs de ses familiers lui présentaient le culte comme tout pacifique. Il est

  1. Se rappeler que l’Histoire de la guerre des Juifs fut (Josèphe du moins nous l’assure) soumise à la censure de Titus, à l’approbation d’Agrippa, qu’elle fut en un mot rédigée dans le sens qui pouvait le plus flatter l’amour-propre de Titus et servir la politique des Flavius. Jos., Vita, 63 ; Contre Apion, I, 9.
  2. Suétone, Titus, 5 : Philostrate, Apoll., VI, 29. Voir ci-après, p. 531-532.
  3. La fortune de Josèphe vint de la sympathie particulière que Titus avait pour lui. B. J., III, viii, 8 et 9.