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si admirable, dont la conservation ferait honneur à son règne et prouverait la modération des Romains. Selon Tacite[1], Titus aurait insisté sur la nécessité de détruire un édifice auquel se rattachaient deux superstitions également funestes, celle des juifs et celle des chrétiens. « Ces deux superstitions, aurait-il ajouté, bien que contraires l’une à l’autre, ont la même source ; les chrétiens viennent des juifs ; la racine arrachée, le rejeton périra vite. »

Il est difficile de se décider entre deux versions aussi absolument inconciliables ; car, si l’opinion prêtée à Titus par Josèphe peut très-bien être regardée comme une invention de cet historien, jaloux de montrer la sympathie de son patron pour le judaïsme, de le laver aux yeux des juifs du méfait d’avoir détruit le temple, et de satisfaire l’ardent désir qu’avait Titus de passer pour un homme très-mo-

  1. M. Bernays (Ueber die Chronik des Sulpicius Severus, Berlin, 1861, p. 48 et suiv.) a démontré que le passage de Sulpice-Sévère, II, xxx, 6-7, est tiré presque mot à mot de la partie perdue des Histoires de Tacite. Tacite aurait lui-même puisé ses renseignements dans le livre qu’Antonius Julianus, l’un des officiers du conseil de guerre, composa sous le titre De Judæis (Minucius Felix, Octav., 33 ; Tillemont, Hist. des emp., I, p. 588). Orose, comme Sulpice-Sévère, eut entre les mains le texte complet des Histoires ; mais il reste dans le vague : diu deliberavit… Il finit cependant par attribuer l’incendie à Titus : incendit ac diruit (VII, 9).